En déplacement à Marseille, le Président de la République s’est livré à une véritable provocation en reprenant à son compte les refrains libéraux de transformation de l’école primaire.

Loin du nécessaire plan d’investissement attendu dans le bâti pour la rénovation d’écoles marseillaises délabrées, Emmanuel Macron entend donc dénaturer profondément le fonctionnement actuel de l’école publique. Ainsi les enseignantes et enseignants des quartiers difficiles de Marseille (et d’ailleurs ?) ne seraient pas « motivé·es » et devraient être « recruté·es » par les directeurs·trices d’école ! Ne traitant pas les questions de fond comme le bâti scolaire, les conditions de travail, les moyens de fonctionnement ou encore l’attractivité des postes, le Président de la République se cantonne, sous couvert d’expérimentation, à une mesure explosive et largement rejetée par la profession comme l’a montré à nouveau l’enquête ministérielle réalisée en décembre 2019. Cette annonce présidentielle opportuniste lance de la plus mauvaise des façons le débat sur l’école dans la campagne présidentielle. Le snuipp13 a lancé un boycot pour que les écoles ne se portent pas volontaires pour l’expérimentation. L’adoption en deuxième lecture à l’Assemblée nationale fin septembre de la proposition de loi Rilhac sur la direction, téléguidée par le ministère, tente elle aussi de mettre en place un nouveau cadre de responsabilité pour les directeurs·trices qui transformerait négativement et en profondeur le fonctionnement collectif des écoles. En parallèle, les groupes de travail du Grenelle proposent des mesures aptes à faire exploser les équipes : avis du directeur ou de la directrice prééminant sur celui des adjoint·es pour certains sujets, participation aux RDV carrière des adjoint·es, choix de qui reçoit des primes… Sont-ce les améliorations que réclament directeurs·trices depuis des années ? Le texte amendé doit passer en séance au Sénat le 20 octobre. S’il est adopté par le Sénat avec ces modifications, la proposition de loi pourrait arriver à nouveau en commission mixte paritaire pour que sénateurs et députés trouvent un accord.

Le traitement de l’Éducation prioritaire est un autre exemple du projet destructif qui se met en place : l’expérimentation d’une Éducation prioritaire par système de contrat conditionne les moyens et le label à la mise en place d’objectifs, de résultats et au choix du recteur ou de la rectrice. On territorialise, on pilote par les chiffres, on met les écoles en concurrence. Une mise en concurrence qui s’exprime également par la mise en place d’une part variable de la prime REP+, selon les écoles qui devront donc se montrer méritantes. Les critères et modalités sont encore flous mais l’idée est inacceptable et va créer des dissensions au sein des équipes.

Plus globalement, après 4 années de réformes ou annonces à tout va, sans jamais ne serait-ce qu’une fois s’abaisser à consulter les professionnel.les que nous sommes, le projet de démantèlement de l’Ecole Publique, porté par notre ministre en particulier et ce gouvernement en général, est désormais bien clair pour toutes et tous : réforme de la formation initiale au rabais, politique de recrutement glissant insidieusement vers une généralisation du recours aux contractuel·les, Education Prioritaire menacée au profit d’une « contractualisation » avec les établissements, Direction d’Ecole non pas allégée mais transformée en maillon d’une gestion hiérarchique de contrôle au plus près des agent·es, évaluations nationales et édition d’une profusion de « guides » et injonctions pour entraver la liberté  pédagogique, recentrage sur des « fondamentaux » aux bases conceptuelles plus que contestables, dérégulation des opérations de gestion de carrière en privant les représentant·es des personnels du pouvoir de contrôle sur les opérations de mutations ou de promotion, un « new management » à l’œuvre au quotidien sous couvert de relation directe entre l’administration et les agents qui détruit le collectif et nous laisse seul·es faces à des décisions parfois arbitraires,   menaces sur les instances compétentes en matière de protection des personnels et de suivi des conditions de travail (fin programmée des CHSCT), ouverture des financements publics locaux aux maternelles privées sous couvert d’obligation scolaire à 3 ans, et encore beaucoup d’autres. La liste est affreusement longue et chaque petit élément témoigne de cette volonté de constituer une école à 2 vitesses : un enseignement privé élitiste et individualiste pour former « l’élite », et une école publique au rabais, sans moyens ni ambitions pour les masses populaires ne pouvant s’offrir les services du privé.

Pourtant, nous continu(er)ons à nous battre pour une École de la République offrant à tout.es les élèves les mêmes ambitions de réussite et d’émancipation individuelle ET collective. Nous continu(er)ons à nous battre pour préserver et développer le statut d’enseignant·e fonctionnaire, seul garant d’une véritable équité, notamment territoriale.

Pour nous, à Marseille comme ailleurs, les écoles ont besoin d’effectifs réduits dans toutes les classes, de personnels spécialisés de Rased et d’équipes pluri-professionnelles renforcées, d’enseignant·es reconnu·es, y compris sur le plan salarial, ainsi que d’une formation de qualité à la hauteur des besoins.

Le fonctionnement de l’école a besoin de directrices et directeurs dont les tâches sont allégées et recentrées sur l’animation et la coordination de l’équipe pédagogique, d’aide administrative et de temps de décharge suffisant.

Le SNUipp-FSU mobilisera encore et toujours les personnels pour tenter de mettre en échec ces projets.